CHAPITRE XIX
Sur un destroyer impérial, les quartiers de l’amiral étaient spacieux et fonctionnels. Daala y vivait depuis plus de dix ans.
Année après année, elle avait travaillé dans le vide interstellaire, toujours seule, suivant les dernières instructions de Tarkin même si elle n’avait jamais reçu de nouvelles du Grand Moff.
La distorsion de la Gueule bloquait toute forme de transmissions. Sa flotte était isolée. Même si Daala maintenait une discipline d’acier, l’équipage des quatre destroyers s’était habitué à la routine.
L’amirale évitait d’imaginer ce qui se passait dans le reste de la Galaxie, pensant ainsi pouvoir compter sur l’Empire et ses règles impitoyables, parfois cruelles, mais toujours limpides.
A présent, dans son désarroi, elle était heureuse de l’isolement de ses quartiers. Si on la voyait dans cet état, c’en était fait de sa réputation.
Tout paraissait si clair avant l’interrogatoire des nouveaux prisonniers…
Daala repassa l’enregistrement pour la énième fois. Elle le connaissait par cœur, mais il lui fallait le voir encore et encore pour se convaincre qu’elle ne cauchemardait pas.
L’homme appelé Yan Solo était attaché à un siège d’interrogatoire.
Sur l’enregistrement, Daala se tenait près du commander Kratas, le capitaine de son vaisseau amiral, le Gorgone. Elle sentait la peur du prisonnier derrière son attitude sarcastique et amère.
Il craquerait avant peu.
– Dites-nous d’où vous venez, demanda l’amirale. L’Alliance Rebelle a-t-elle été écrasée ? Qu’est-il arrivé à l’Empire ?
– Allez-vous faire voir chez les Hutts ! rétorqua Solo.
Haussant les épaules, Daala se tourna vers Kratas. Le commander activa des commandes sur son pupitre.
Une barre métallique du fauteuil d’interrogatoire vrombit. Les muscles de la cuisse gauche de Solo furent pris de spasmes.
Son visage trahissait son étonnement et sa détresse, comme s’il ne comprenait pas pourquoi son corps ne lui obéissait plus.
Daala sourit.
Kratas bascula une autre commande.
Le prisonnier grimaça de douleur ; les muscles du côté gauche de sa cage thoracique furent parcourus de spasmes.
Solo retint à grand-peine un cri.
– Parlez-nous de l’Empire, ordonna Daala.
– L’Empire est au broyeur à ordures ! s’exclama Yan. L’Empereur est mort. Il a été tué dans l’explosion de la deuxième Etoile Noire.
Daala et Kratas levèrent la tête :
– La deuxième Etoile Noire ? Dites-moi ce que vous savez.
– Non.
– Si, insista l’amirale.
Le commander appuya sur un autre bouton.
La main droite de Solo trembla. Le Corellien lutta contre l’affolement.
– La deuxième Etoile Noire ? répéta Daala.
– Elle était encore en chantier quand nous avons provoqué une réaction en chaîne pour détruire son réacteur. Dark Vador et l’Empereur étaient à bord.
Même s’il résistait pour la forme, leur livrer semblables nouvelles le réjouissait.
– Qu’est-il arrivé à la première Etoile Noire ?
Solo sourit :
– L’Alliance l’a détruite.
L’amirale resta sceptique. Sous la torture, un prisonnier pouvait dire n’importe quoi. Mais elle craignait que ce ne fut vrai… Cela expliquait les années de silence.
– Et le Grand Moff Tarkin ?
– Ses atomes flottent dans le système de Yavin. Il a brûlé dans son Etoile Noire, payant pour la mort du peuple d’Alderaan, la planète qu’il a détruite.
– Alderaan a été détruite ? répéta l’amirale, levant un sourcil étonné.
Kratas augmenta la puissance de la machine de torture. Daala savait à quoi le commander pensait : durant leurs années d’isolement, ils avaient songé que l’Empereur maintiendrait sa poigne de fer, que la flotte impériale et son Etoile Noire assiéraient son pouvoir sur la Galaxie. L’Ancienne République avait duré mille générations.
Et l’Empire… Etait-il possible qu’il soit tombé en quelques décennies ?
– Combien de temps a passé depuis l’explosion de l’Etoile Noire ?
– Sept ans.
– Qu’est-il arrivé depuis ? (Daala s’assit.) Dites-moi tout ce que vous savez.
Lentement, le prisonnier leur conta l’histoire de la guerre civile, du Grand Amiral Thrawn, la résurrection de l’Empereur, la trêve de Bakura…
Finalement, l’amirale ordonna à Kratas d’arrêter. Le bourdonnement du fauteuil cessa.
Yan Solo s’affaissa sur son siège.
Daala fit signe à un droïd de torture d’approcher pour continuer l’interrogatoire. Ses seringues hypodermiques scintillaient sous l’éclairage blanc du vaisseau.
Yan tenta de reculer ; l’amirale lut de la crainte dans ses yeux.
– Voilà, dit-elle. A présent, le droïd va confirmer ce que vous nous avez dit.
Elle se leva et sortit.
Le droïd avait découvert que Solo disait la vérité. Seule dans sa cabine, Daala coupa l’enregistrement. Une migraine prenait naissance dans un coin de son crâne.
Apprenant que le nouveau prisonnier avait été à bord de l’Etoile Noire, un scientifique du Complexe de la Gueule avait demandé à lui parler. Après censure, bien entendu, Daala lui ferait parvenir le rapport d’interrogatoire. Parfois, satisfaire ces savants relevait de la gageure, car ils avaient des choses une vision faussée.
Pour le moment, Daala avait d’autres soucis. Elle devait décider que faire de ces révélations pour le moins troublantes.
Elle se tenait devant un miroir, face à son reflet en pied. Son uniforme vert-olive n’accusait aucun faux pli. Grâce à un régime strict agrémenté d’exercices, elle n’avait pas pris un kilo pendant sa longue mission. Malgré le passage des ans, son apparence la satisfaisait toujours.
Daala arborait fièrement son insigne d’amirale : une rangée de six rectangles rouges disposés au-dessus d’une série de rectangles bleus. A sa connaissance, elle était la seule femme à avoir atteint ce grade dans la Marine Impériale. Il s’agissait d’une promotion spéciale, accordée par le Grand Moff Tarkin. Il était même possible que l’Empereur n’en ait rien su. En tout cas, il ignorait tout du Complexe de la Gueule.
Sa chevelure rousse ondulait sur ses épaules. Dix ans auparavant, Daala était arrivée avec des cheveux coupés court, une humiliation que l’académie impériale infligeait aux candidates.
Sur ordre direct de Tarkin, l’amirale avait pris la direction du projet.
Certains règlements ne s’appliquaient plus à son cas. Elle refusait de se couper les cheveux, un geste d’indépendance : le grade avait ses privilèges. Elle se disait que Tarkin aurait approuvé.
Mais il était mort.
Faisant demi-tour, elle baissa les lumières et activa la porte. Dehors, les deux gardes du corps la saluèrent vivement. Malgré l’isolement du Complexe de la Gueule, Daala insistait sur la disponibilité de son équipage, qu’elle assurait par des exercices réguliers et des jeux de guerre. Elle était sortie du meilleur moule impérial. Même si le système avait fait de son mieux pour détruire ses ambitions, elle suivait ses règles.
Sous leur armure, les deux gardes étaient beaux et bien bâtis ; pourtant Daala n’avait plus pris d’amant depuis le Grand Moff Tarkin.
Après lui, fantasmer avait suffi.
– Escortez-moi jusqu’au hangar aux navettes, ordonna-t-elle. Je me rends au Complexe. Informez l’officier de garde que je vais voir Tol Sivron.
Un des hommes grommela quelque chose dans le micro de son casque.
Songeant à la complexité de son navire, à ses troupes, au personnel de soutien, l’amirale traversa les couloirs. D’ordinaire, dans la flotte impériale, un destroyer abritait trente-sept mille hommes d’équipage et quelque cent mille soldats. A cause du secret du Complexe, Tarkin lui avait laissé un équipage réduit à sa plus simple expression : des gens sans famille, sans liens avec l’extérieur, souvent recrutés dans des mondes ravagés par les premières batailles de l’Empire.
Soumis à la discipline la plus rude, son équipage était piégé depuis onze ans dans l’amas de trous noirs, sans autre distraction que les loisirs proposés à bord. Les hommes s’étaient lassés des programmes de la bibliothèque…
Ils s’ennuyaient et enrageaient de rester sur la brèche sans nouvelles de l’extérieur. Bien armés, ils ne rêvaient que d’une chose : quitter la Gueule et agir…
Daala comme les autres.
Sous ses doigts, elle disposait de la puissance de feu de soixante batteries de turbolasers, de soixante canons à ions, et de dix projecteurs de rayon tracteur. Dans ses hangars, le Gorgone transportait six escadrilles de chasseurs Tie, deux navettes d’assaut de classe gamma, vingt quadripodes BT-TT, et trente bipodes TR-TT.
Trois autres forteresses, le Manticore, le Basilic et l’Hydre, orbitaient autour du Complexe de la Gueule sous le commandement de Daala. Des années plus tôt, Tarkin avait conduit en personne la jeune femme aux chantiers navals de Kuat pour contrôler la construction de ses destroyers.
Tarkin et Daala avaient piloté la petite navette d’inspection autour des énormes superstructures assemblées en orbite. Tous deux avaient gardé le silence pendant la quasi-totalité du trajet, émerveillés par la grandeur de la tâche. Dans l’espace, ouvriers, navires de transport et autres engins créaient un véritable essaim de lumières et d’activités.
Tarkin avait posé ses mains sur les épaules de sa protégée :
« Daala, je t’offre assez de puissance pour réduire une planète en poussière. »
A présent, à bord du destroyer impérial Gorgone, l’amirale Daala entrait dans l’ascenseur qui la conduirait au niveau des hangars.
Quand les portes s’ouvrirent sur la baie aux navettes, elle n’annonça pas son arrivée.
Elle fut heureuse de voir ses hommes s’affairer autour des chasseurs Tie, des navettes et des véhicules de service. Après tant d’années, son personnel maintenait chaque système en parfait état de marche.
Quelques mois après la construction du Complexe, Daala avait remarqué le malaise de ses troupes, sûre d’être en partie responsable : commandés par l’unique femme aussi gradée de l’Empire, envoyés en mission pour protéger des scientifiques dans un coin perdu de la Galaxie, ses subordonnés avaient commencé à se relâcher. Quelques exécutions et des menaces continuelles maintenaient une efficacité maximale.
Cette tactique obéissait à une des premières leçons de Tarkin : commander par la crainte, plutôt que par la force. En tout, Daala dirigeait près de cent quatre-vingt mille personnes, sans compter les ingénieurs en armement. Elle n’entendait pas gaspiller ce potentiel.
Dans une cage électromagnétique englobant l’intégralité du navire, des techniciens s’affairaient autour de la navette impériale capturée.
Endor, quel genre de nom est-ce là ?
Jamais elle n’avait entendu ce terme auparavant. C’était certainement le lieu d’une grande victoire de l’Empire…
Ses hommes fouillaient le petit navire à la recherche des enregistrements de vol et de la boîte noire.
Un instant, Daala songea à offrir la navette endommagée à Tol Sivron, le chef du Complexe : il serait surpris au point de lui accorder un peu d’attention, pour une fois. Mais ce serait infantile. Elle laissa les techniciens continuer leur travail et se dirigea vers la navette impériale Edict.
– Je piloterai seule, dit-elle aux gardes. Laissez-moi.
Elle savait d’avance ce que dirait Sivron en apprenant les nouvelles. Cette fois, il ne s’en sortirait pas à si bon compte.
Les soldats se remirent au garde-à-vous tandis que Daala s’engageait sur la rampe d’accès.
Une fois dans la cabine de pilotage, elle agit avec l’aisance née de l’habitude, allumant les moteurs, puis vérifiant chaque système avant le décollage. Ensuite, elle mit le casque-radio sur ses oreilles, attentive au vecteur d’approche tandis qu’elle franchissait le bouclier magnétique protégeant le hangar du vide sidéral.
La coque de gaz incandescents tournoyait autour des trous noirs. Au-dessous se dressait le Complexe de la Gueule, un laboratoire construit sur un groupe d’astéroïdes rassemblés au centre de l’îlot gravitationnel. Des passerelles et des poutres maintenaient les différents rochers en place.
Sous la direction du Grand Moff Tarkin, les navires de l’Empire avaient remorqué les astéroïdes dans l’espace jusqu’au passage de la Gueule. L’intérieur des rochers avait été creusé pour y installer des modules d’habitation, des laboratoires, des chaînes d’assemblage de prototypes et des salles de réunion.
Daala se souvenait encore du communiqué envoyé par Tarkin à l’Empereur, sur le sujet épineux des super-armes.
« Si nous présentons au citoyens une arme tellement puissante que trouver une parade est un inconcevable défi, une arme invulnérable et invincible, elle deviendra le symbole de l’Empire. Nous aurions besoin d’une poignée de ces armes pour soumettre des milliers de mondes, chacun abritant des millions et des millions d’êtres. Une telle arme doit avoir une force assez grande pour détruire un système solaire ; alors la crainte qu’elle inspirera suffira à vous garantir un règne pacifique. »
Après avoir obtenu la permission de l’Empereur, Tarkin avait usé de son autorité de Grand Moff pour construire la base secrète, où il pourrait isoler les meilleurs scientifiques et les plus grands théoriciens, et leur ordonner de fabriquer de nouvelles armes pour l’Empereur. Comme le Grand Moff parlait fort peu, l’Empereur lui-même avait ignoré l’existence du Complexe de la Gueule.
Croyant leur tâche terminée, les ouvriers et les architectes de la station avaient embarqué à bord d’un transport de personnel. Daala avait reprogrammé leur ordinateur.
Le navire s’était perdu dans un trou noir.
Rien n’avait été laissé au hasard.
Le secret avait été protégé. Après que Tol Sivron et son équipe eurent mis au point le prototype de l’Etoile Noire, le Grand Moff Tarkin avait réquisitionné un des meilleurs scientifiques du groupe, Bevel Lemelisk, pour superviser la construction de l’arme véritable.
Les dernières paroles de Tarkin constituaient un défi lancé aux savants :
« Bien. A présent, créez une arme encore plus puissante. Surpasser l’Etoile Noire paraît peut-être inconcevable, mais nous devons asseoir notre supériorité et attiser la peur dans le cœur des citoyens de l’Empire. L’Etoile Noire est terrifiante. Trouvez quelque chose de pire. C’est votre raison d’exister. »
Tarkin leur avait laissé neuf ans pour développer l’arme ultime.
Tarkin mort, l’existence du Complexe de la Gueule ignorée de tous, Daala prenait ses propres décisions, et choisissait son plan d’action.
Atteignant enfin le champ gravifique de l’astéroïde central réservé à l’administration, l’amirale accosta. Ensuite, elle respira l’air recyclé et poussiéreux de la station, souhaitant déjà retrouver l’environnement stérile du Gorgone. Elle verrait Tol Sivron au plus vite, puis elle repartirait.
Un groupe de gardes se précipita pour lui prêter assistance.
– Suivez-moi, ordonna-t-elle.
Une démonstration de force suffirait à calmer les protestations de l’administrateur scientifique.
Elle traversa à l’improviste les bureaux administratifs, suivie des soldats.
– Tol Sivron, je dois vous parler, dit-elle en faisant irruption dans le fief de l’homme. J’ai des nouvelles importantes à vous communiquer.
Le bureau de l’administrateur débordait d’objets hétéroclites. Plus bureaucrate que scientifique, Tol Sivron demandait aux théoriciens et aux concepteurs de construire des maquettes et des prototypes qu’il laissait sur ses étagères, sur les meubles… partout.
Jouait-il avec quand il s’ennuyait ?
Sivron se tourna vers elle :
– Des nouvelles ? Nous n’en avons plus depuis dix ans.
Sivron était un Twi’lek au visage glabre ; deux tentacules de chair tombaient sur ses épaules comme des nattes. Ses yeux porcins et sa bouche remplie de petites dents pointues ajoutaient au dégoût que ressentait l’amirale à sa vue. Généralement, les Twi’leks n’étaient pas très recommandables ; ils rôdaient avec les contrebandiers, les mercenaires, ou entraient au service de criminels comme Jabba le Hutt.
Même si Daala mettait rarement en question les décisions de Tarkin, elle ne comprenait pas comment Tol Sivron avait obtenu un poste aussi important, alors que le Grand Moff haïssait les races non humaines.
– Eh bien, aujourd’hui, tout change. Nous avons capturé trois prisonniers qui se sont introduits dans la Gueule à bord d’une navette impériale volée. Nous les avons questionnés. Je ne vois aucune raison de douter de la véracité de leurs informations, aussi déplaisantes soient-elles.
– Alors ?
Daala garda un visage impassible :
– L’Empereur est mort ; les Rebelles l’ont emporté. Quelques guerriers ont tenté de sauver l’Empire, mais leurs efforts se sont soldés par des années de guerre civile. Aujourd’hui, une Nouvelle République dirige la Galaxie.
Sivron se redressa, visiblement choqué. Par réaction, ses tentacules se rétractèrent derrière sa nuque.
– Mais est-ce vraiment arrivé ? Avec l’aide de l’Etoile Noire…
– Le Grand Moff Tarkin a bien construit une Etoile Noire, mais les Rebelles ont volé les plans. Ils ont découvert un point faible, un conduit de ventilation qui permettait à un chasseur d’accéder au réacteur central. L’Alliance a détruit l’Etoile Noire et tué Tarkin.
– Je vais réunir une équipe pour corriger ce défaut ! s’exclama Sivron, piqué au vif. Tout de suite !
– A quoi bon ? coupa l’amirale. Tarkin a emmené Bevel Lemelisk avec lui.
« Après la destruction de l’Etoile Noire, l’Empereur lui a demandé de construire une nouvelle version, en éliminant le défaut. La deuxième Etoile Noire était encore en chantier quand elle a été détruite par les Rebelles.
Sivron écrasa son poing sur le bureau. Tandis que les années passaient, le Twi’lek avait envoyé par le couloir de la Gueule des sondes qui transportaient des rapports pour Tarkin.
Daala avait reçu l’ordre de ne pas quitter le Complexe. Ainsi ils ne pouvaient qu’attendre.
Et ils avaient attendu.
L’erreur principale de Daala avait été de surestimer les capacités de son mentor. Sortie fort bien classée de l’académie impériale de Carida, un des plus rudes centres d’entraînement de l’Empire, elle avait excellé dans chaque discipline, vaincu plusieurs guerriers en combat singulier et usé de ses talents de stratège pour détruire des armées entières en simulation.
Mais parce qu’elle était une femme, et que ses semblables se faisaient extrêmement rares dans les QG impériaux, l’académie de Carida avait confié à Daala des postes difficiles et ingrats, alors qu’elle plaçait des hommes moins talentueux – qu’elle avait vaincus à maintes reprises –, à des positions clés.
Frustrée, Daala s’était créé une fausse personnalité sur le réseau informatique, un pseudonyme qu’elle utilisait pour suggérer des idées qu’on n’aurait pas écouté autrement. Quand quelques-unes s’étaient révélées payantes, le Grand Moff Tarkin était venu sur Carida rencontrer le brillant tacticien…
Une enquête avait grillé la couverture de la jeune femme.
Heureusement, Tarkin avait l’esprit plus ouvert que l’Empereur. Discrètement, il avait pris Daala à son service.
Ames sœurs, ces deux êtres durs et impitoyables étaient devenus amants. Plus vieux qu’elle, Tarkin avait un charisme et une puissance qu’admirait Daala. Même en présence de Dark Vador, son mentor ne faiblissait pas.
Plus tard, le Grand Moff Tarkin lui avait confié les quatre destroyers impériaux chargés de surveiller le Complexe de la Gueule.
Après le rapport des prisonniers, tout changeait.
Tout.
Sivron la foudroya du regard :
– Où sont vos informateurs ?
– A bord du Gorgone. Ils récupèrent… des rigueurs de l’interrogatoire.
– Et si quelqu’un venait à leur recherche ?
– Ils se sont échappés des mines d’épices de Kessel. Ils ignoraient où ils allaient. On les pensera disparus dans la Gueule. D’ailleurs, je ne comprends pas comment ils ont survécu à la traversée.
– Pourquoi ne vous en êtes-vous pas débarrassés ? demanda l’administrateur.
Daala conserva sa patience au prix d’un terrible effort. C’était un autre exemple de l’étroitesse d’esprit des Twi’leks.
– Ils représentent notre seul lien avec l’extérieur depuis dix ans, Qwi Xux a déjà demandé de les interroger à propos de l’Etoile Noire. Nous aurons peut-être besoin d’eux pour obtenir un complément d’informations… avant de décider de notre prochaine action.
Sivron cligna des yeux, incrédule :
– Notre action ? Que voulez-vous dire ? Qu’allons-nous faire ?
Elle croisa les bras sur sa poitrine :
– Nous pouvons armer le Broyeur de Soleil et détruire la Nouvelle République, système après système.
Le Twi’lek se leva d’un bond :
– Le Broyeur de Soleil n’est pas prêt ! Il nous reste des tests à effectuer, des rapports à remplir…
– Vous piétinez depuis deux ans, en retard sur le calendrier en raison de votre indolence de bureaucrate. Le Grand Moff Tarkin ne reviendra pas ; vous n’avez plus besoin d’excuses. Il me faut l’arme ; avec ou sans votre permission, je la prendrai.
Elle repensa aux paroles de Tarkin, lors de la visite des chantiers navals de Kuat en sa compagnie : Daala, je t’offre assez de puissance pour réduire une planète en poussière. Avec le Broyeur de Soleil, au stade du prototype, elle mettrait la Nouvelle République à genoux.
– Si Solo dit la vérité, continua-t-elle, ma flotte représente la plus importante unité de la Marine Impériale encore en activité. (Elle ramassa une maquette.) Nous ne pouvons plus attendre. Il est temps de leur montrer de quoi nous sommes capables.